Sanguinaria canadensis

La fleur craintive de la sanguinaire fait une apparition, pour une dizaine de jours, vers la fin d’avril. Comme une étoile, elle s’épanouit au-dessus d’une feuille unique, délicatement lobée. La belle s’enroule dans ce manteau que l’on croirait taillé dans une jeune pousse d’épinard. Dès que midi est passé, les pétales se redressent et l’inflorescence se referme lentement pour la nuit. Le cœur de la plante renferme un latex rouge sang que les autochtones utilisaient comme teinture. Les sanguinaires percent les décombres de l’hiver pour appuyer leurs fronts contre le ciel. Elles forment de grandes colonies sous les arbres encore dénudés. Ce spectacle émouvant m’a fait m’arrêter sur le sentier du Bois-de-Liesse, le temps d’une inspiration.

Au sommet rocailleux de la colline, devant une éclaircie dans les taillis, une aubépine attendait le soleil. Des vagues grises venaient mourir sur la grève. Le fond de l’air était frais, chargé d’humidité, et un pic tambourinait sur la cime d’une épinette.

Sanguinaire du CanadaSanguinaire du Canada, Bloodroot, Sanguinaria canadensis
Photo : Tom Potterfield, CC BY-NC-ND 2.0

Note : La Sanguinaire du Canada a été déclarée espèce vulnérable à la récolte au Québec. la récolte de spécimens entiers et le commerce de tout spécimen récolté dans des populations sauvages (parties aériennes ou souterraines) sont interdits.

Motif

Je suis ambivalent par rapport à cette crise que nous traversons. Comme tout le monde, je suis inquiet pour la santé de mes proches et je me demande ce qu’il adviendra de mon avenir professionnel dans un contexte de crise économique. Je me suis endetté pour acheter une tablette et un ordinateur doté d’une bonne carte graphique. Je dois commencer les paiements alors que je me retrouve du jour au lendemain sans revenus. Mais je ne peux m’empêcher de me réjouir du calme de mon quartier, des étoiles qui apparaissent maintenant quand le jour tombe, de la pollution qui diminue. À quelque choses malheur est bon. Une partie de moi s’impatiente, je veux savoir ce qui s’en vient, planifier. Et en même temps, je voudrais que cette période où le temps est suspendu ne se termine jamais. Je passe mes journée à dessiner, par plaisir. Je dois même me mettre des limites. À trop passer de temps sur la tablette, je suis en train de développer une tendinite à l’épaule…

motif
1er essai de motif, trois plantes indigènes du Québec : Anemone canadensis, Fragaria virginiana et Aquilegia canadensis

Fasciné par les œuvres de William Morris, j’ai passé la journée à travailler sur ce motif. J’ajouterai une couche d’entrelacs derrière les plantes. J’en suis à me demander comment organiser ma vie pour en libérer la plus grande partie pour les projets dont j’ai réellement envie.