La fleur craintive de la sanguinaire fait une apparition, pour une dizaine de jours, vers la fin d’avril. Comme une étoile, elle s’épanouit au-dessus d’une feuille unique, délicatement lobée. La belle s’enroule dans ce manteau que l’on croirait taillé dans une jeune pousse d’épinard. Dès que midi est passé, les pétales se redressent et l’inflorescence se referme lentement pour la nuit. Le cœur de la plante renferme un latex rouge sang que les autochtones utilisaient comme teinture. Les sanguinaires percent les décombres de l’hiver pour appuyer leurs fronts contre le ciel. Elles forment de grandes colonies sous les arbres encore dénudés. Ce spectacle émouvant m’a fait m’arrêter sur le sentier du Bois-de-Liesse, le temps d’une inspiration.
Au sommet rocailleux de la colline, devant une éclaircie dans les taillis, une aubépine attendait le soleil. Des vagues grises venaient mourir sur la grève. Le fond de l’air était frais, chargé d’humidité, et un pic tambourinait sur la cime d’une épinette.
Sanguinaire du Canada, Bloodroot, Sanguinaria canadensis
Photo : Tom Potterfield, CC BY-NC-ND 2.0
Note : La Sanguinaire du Canada a été déclarée espèce vulnérable à la récolte au Québec. la récolte de spécimens entiers et le commerce de tout spécimen récolté dans des populations sauvages (parties aériennes ou souterraines) sont interdits.